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jeudi 17 février 2011

El Señor Presidente, Miguel Ángel Asturias

Miguel Cara de Ángel, el hombre de toda la confianza del Presidente, entró de sobremesa.
—¡Mil excusas, señor Presidente! —dijo al asomar a la puerta del comedor. (Era bello y malo como Satán)—. ¡Mil excusas, Señor Presidente, si vengo-ooo... pero tuve que ayudar a un leñatero con un herido que recogió de la basura y no me fue posible venir antes! ¡Informo al Señor Presidente que no se trataba de persona conocida, sino de uno así como cualquiera!
El Presidente vestía, como siempre, de luto riguroso: negros los zapatos, negro el traje, negra la corbata, negro el sombrero que nunca se quitaba; en los bigotes canos, peinados sobre las comisuras de los labios, disimulaba las encías sin dientes, tenía los carrillos pellejudos y los párpados como pellizcados.
—¿Y se lo llevó adonde corresponde?... —interrogó desarrugando el ceño...
—Señor...
—¡Qué cuento es ése! ¡Alguien que se precia de ser amigo del Presidente de la República no abandona en la calle a un infeliz herido víctima de oculta mano!
Un leve movimiento en la puerta del comedor le hizo volver la cabeza.
—Pase, general...
—Con el permiso del Señor Presidente...
—¿Ya están listos, general?
—Sí, Señor Presidente...
—Vaya usted mismo, general; presente a la viuda mis condolencias y hágale entrega de esos trescientos pesos que le manda el Presidente de la República para que se ayude en los gastos del entierro.
El general, que permanecía cuadrado, con el quepis en la diestra, sin parpadear, sin respirar casi, se inclinó, recogió el dinero de la mesa, giró sobre los talones y, minutos después, salió en automóvil con el féretro que encerraba el cuerpo de ese animal.
Cara de Ángel se apresuró a explicar:
—Pensé seguir con el herido hasta el hospital, pero luego me dije: «Con una orden del Señor Presidente lo atenderán mejor.» Y como venía para acá a su llamado y a manifestarle una vez más que no me pasa la muerte que villanos dieron por la espalda a nuestro Parrales Sonriente...
—Yo daré la orden...
—No otra cosa podía esperarse del que dicen que no debía gobernar este país...
El Presidente saltó como picado.
—¿Quiénes?
—¡Yo, el primero, Señor Presidente, entre los muchos que profesamos la creencia de que un hombre como usted debería gobernar un pueblo como Francia, o la libre Suiza, o la industriosa Bélgica o la maravillosa Dinamarca!... Pero Francia..., Francia sobre todo... ¡Usted sería el hombre ideal para guiar los destinos del gran pueblo de Gambetta y Víctor Hugo!


Miguel Gueule d'Ange, l'homme en qui le Président avait une confiance totale, arriva une fois le repas fini.
« Milles excuses, monsieur le Président ! – dit-il en entrant par la porte de la salle à manger. (Il était beau et mauvais comme Satan) – Milles excuses, monsieur le Président, j'arrive à l'instant ... c'est qu'il m'a fallu aider un bûcheron qui avait extrait des poubelles une personne blessée et je n'ai pas pu être là avant. J'informe monsieur le Président qu'il ne s'agissait en aucun cas d'une personne connue, mais d'un simple citoyen lambda.»
Le Président était, comme toujours, habillé en tenue de deuil : chaussures noires, costume noir, cravate noire, et chapeau noir qu'il n'enlevait jamais. Sa moustache plus sel que poivre, peignée aux commissures des lèvres, dissimulait des gencives sans dents, il avait la peau des joues flasque et les paupières comme pincées.
« Et vous l'avez conduit où il convenait ?... – demanda-t-il en relevant les sourcils...
– Monsieur …
– Qu'est ce que vous me chantez là ? Quelqu'un qui se targue d'être l'ami du Président de la République n'abandonne pas dans la rue une malheureuse victime, blessée par on ne sait qui. »
Un léger mouvement près de la porte de la salle à manger lui fit tourner la tête.
« Entrez, général...
– Avec votre permission, monsieur le Président, …
– Est-ce qu'ils sont prêts, général ?
– Oui, monsieur le Président.
– Que ce soit vous qui y alliez, général. Présentez à la veuve mes condoléances et remettez lui ces trois cents pesos que le Président de la République lui envoie afin qu'elle puisse payer les frais liés à l'enterrement.
Le général, qui se maintenait au garde à vous, le képi à la main droite, sans cligner des yeux, presque sans respirer, s'inclina, récupéra l'argent sur la table, tourna les talons et, quelques minutes plus trad, sortit en voiture, avec le cercueil qui enfermait le corps de cet animal. »
Gueule d'Ange se hâta de s'expliquer :
« J'ai pensé accompagner le blessé à l'hôpital, mais ensuite je me suis dit :  "Avec un mot de monsieur le Président, ils s'en occuperont certainement mieux". Et, comme je venais là, non seulement sur votre commandement, mais aussi pour vous avouer une fois de plus que je ne me remets pas de la mort de « Parrales Sonriente », causée par ces scélérats...
– Je leur en donnerai l'ordre.
– Je ne pouvais espérer rien d'autre de celui dont on dit qu'il ne devrait pas gouverner ce pays.
Le Président sursauta, comme offusqué.
– Qui « on » ?
– Moi le premier, monsieur le Président, je suis de ceux qui répandent l'idée qu'un homme comme vous devrait gouverner un pays comme la France, ou la libre Suisse, ou l'industrieuse Belgique, ou le merveilleux Danemark ! Mais la France... la France surtout... Vous seriez l'homme idéal pour guider le destin des concitoyens de Gambetta et de Victor Hugo ! »

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